Jean-Marc Jancovici est ingénieur polytechnicien, et, « à 99 % par hasard », il se consacre depuis plus de 20 ans au changement climatique, comme consultant, enseignant, conférencier, et activiste, à la tête du think-tank The Shift Project. Dans un entretien paru dans dernier numéro de la revue Limite, il revient sur son travail, critique les économistes et détaille sa vision de la révolution. Depuis peu, Jean-Marc Jancovici fait le tour des médias et des amphithéâtres pour prôner une certaine idée de la décroissance. Signe d’un changement des mentalités diraient certains. Lui n’en est pas convaincu… Extrait.

PROPOS RECUEILLIS PAR EUGÉNIE LE QUÉRÉ / ILLUSTRATIONS DE CAMILLE PATUREAU

[…]

Vous voyez des signaux encourageants, une progression de l’idée de décroissance dans l’opinion ? Le changement incrémental est en marche ?

Non, je ne suis pas sûr. On m’invite sur tous les plateaux, mais je suis traité comme une bête de foire par les médias, une simple distraction. La décroissance, c’est comme un film qu’on va voir pour se faire des frissons dans le dos, et puis quand on sort c’est fini. On revient à la ligne éditoriale.

Mais vous avez quand même un sacré succès ? Il y a trente ans, vous n’auriez pas pu donner une conférence à Polytechnique ou à l’Essec sur la décroissance, on vous aurait jeté des tomates et évacué… là vous êtes applaudi par une salle comble, et réinvité.

J’ai mis du temps à comprendre pourquoi mes conférences marchent bien. Je crois que c’est parce que j’apporte une nouvelle cohérence. Mon public est fait de gens qui ne comprennent pas pourquoi ils ne comprennent pas l’économie. Les économistes ont tous les manettes du pouvoir, mais on voit bien qu’ils n’ont que peu de prise sur la réalité, et que leurs prédictions ne se réalisent pas. Moi, je donne une grille de lecture qui explique ce paradoxe, et mon public en ressent un certain soulagement intellectuel, une satisfaction du besoin de comprendre. Mais ça reste de toutes petites audiences. Je suis très regardé sur Youtube, mais toujours par les mêmes… et uniquement par des CSP+.

Tout ça, c’est des idées de riches ?

Je ne sais pas… L’argent rend confiant, les gens riches ont plus de mal à intégrer un discours sur un avenir contraint. Alors que les pauvres, eux…

La suite de l’entretien est disponible dans la revue Limite n°26 « Débranchez le progrès » à retrouver en kiosque. 98p. 12€