Aude-Reine était juriste, chancelière du diocèse de Nanterre. Régis était journaliste, rédacteur en chef de l’agence d’information des Missions Étrangères de Paris. Parents de sept enfants, ils menaient la vie commune d’une famille nombreuse en Ile-de-France. Mais un appel a retenti, tenace, qui les a menés jusqu’aux confins de la Loire: in vino veritas!

Extrait.

Sur nos cartons de vin, sur nos étiquettes, il est écrit: « Fruit de la vigne et du travail des hommes ». Même sans beaucoup de culture chrétienne, chacun reconnaît là les paroles de la consécration eucharistique. Lors de la messe, les prêtres du monde entier redisent ces mots rappelant le lien étroit entre ce sacrement, les hommes et leur travail, et la terre confiée par Dieu à l’humanité. Le psaume 104 évoque, quant à lui, « le pain qui soutient le cœur de l’homme » et « le vin qui réjouit le cœur de l’homme ».

Nous aurions pu choisir de devenir paysan-boulanger, nous avons opté pour la vigne. Le pain nourrit, le vin réjouit. Deux fruits de la terre qui, lors de chaque Eucharistie, sont la matière qui actualise le lien indéfectible entre le Ciel et la terre, entre le Créateur et sa Création.

Un sol vivant pour un vin naturel

Inscrit dans cette perspective, comment notre travail se conçoit-il? Certes, nous travaillons beaucoup – et le passage d’une vie d’urbains les doigts rivés à un clavier d’ordinateur à celui de vignerons munis d’un sécateur compte son lot de douleurs, d’efforts… et d’émerveillements. Mais « ce fruit de la vigne » que nous cherchons à exprimer, il n’est pas seulement dû « au travail des hommes ». Les orages de ces jours-ci peuvent tout nous reprendre et, en un quart d’heure, une pluie de grêle mettre à bas une année de labeur. Plus profondément, tout est don, et la vigne n’est que le résultat de la bonté de Dieu envers les hommes, un dieu qui nous nourrit et qui veut notre joie.

De cette profession de foi découle le reste, c’est-à-dire les choix que nous posons pour, très modestement et sans aucune certitude quant au résultat final, conduire notre travail à la vigne et au chai.

Notre exploitation (terme commun dans l’agriculture d’aujourd’hui, même si nous n’exploitons rien ni personne) est certifiée « Bio »; pourtant, nous avons été frappés, à la lecture des chartes Bio, Biodynamie ou même SaINS (Sans aucun intrant ni sulfite – ajouté), de ne découvrir rien ou presque concernant la vie des sols. Il nous semble cependant que c’est bien là la première pierre à poser : avant tout, chercher à favoriser la vie du sol, de manière à ce que les micro-organismes, les réseaux mycorhiziens, la macro-faune du sol contribuent à alimenter sainement la vigne – et à ce que nos vins en expriment le terroir.

Illustration de Victor Carpentier

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Cet extrait est tiré du dossier sur la nourriture du dernier numéro de la revue Limite. Vous pouvez la trouver à la commande en ligne et en librairie !

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