C’est par une après-midi ensoleillée que nous arrivons à la Bénisson-Dieu, aussitôt séduites par le charme de ce petit village dominé par son église abbatiale du 12ème siècle dont le toit coloré de tuiles vernissées brille. Nous avons entendu parler des familles qui y vivent en écologie intégrale par une amie durant le confinement et cela a éveillé notre curiosité. Déjà intéressées par l’écologie, nos stages professionnels du début de l’été annulés et désireuses de vivre une expérience enrichissante qui nous sortirait de notre quotidien de parisiennes hypokhâgneuses, nous avons mis le cap pour douze jours sur cet éco-hameau chrétien.

Venues aider les institutrices Virginie et Elsa pour organiser la fête de l’école, nous apprenons également beaucoup des rencontres avec les différentes familles de l’éco-hameau. Devant le chemin déjà̀ accompli par chacune d’entre elles depuis un an ou plus, nous débordons de questions, et les repas s’éternisent pour notre plus grand bonheur ! Outre le soutien que nous apportons à l’école, nous apprenons à entretenir les jardins-potagers : désherbage, palissage, paillage, arrosage, plantation de pieds de tomates, récoltes de pommes de terre, nous avions presque la main verte ! C’est avec joie que nous avons aussi travaillé dans les vignes, en pulvérisant aux premiers rayons du soleil un mélange naturel destiné à les guérir de l’oïdium. 

Pour Aude-Reine et Régis, la vigne– « fruit de la terre et du travail des hommes » — leur permet de nourrir leur relation à l’environnement. « Tout est lié » répète le Pape François dans Laudato Si ; ainsi sont tissés leur amour de Dieu, de soi et d’autrui. Cette encyclique sur l’écologie est une balise : elle pose certains principes, oriente tout choix de vie tout en laissant chacun profondément libre d’emprunter la voie qu’il souhaite. En effet, il y a de multiples manières de vivre l’écologie intégrale. Cependant, l’appliquer au quotidien nous est apparu parfois une tâche insurmontable. Comment maintenir comme cap la volonté́ d’être gardien et protecteur de la nature et de la Vie tout en affrontant les premières difficultés liées à l’autonomie alimentaire, à la sobriété́ écologique ? Les familles y parviennent progressivement, par exemple en réduisant les déchets, en se lançant dans la permaculture, en apprenant aux enfants les fondamentaux de la botanique ou de la philosophie … tout en mettant au premier plan les relations fraternelles et filiales, car l’écologie ne se réduit pas à la nature.

Quand nous repensons avec nostalgie à ces quelques jours à la Bénisson-Dieu, ce sont des rires d’enfants, des relations authentiques, l’espoir d’une harmonie avec la nature retrouvée, une vie sobre et heureuse -pour reprendre les mots de Pierre Rabhi- qui nous viennent à l’esprit. Dans une grande simplicité́, que ce soit à travers les danses qui fleurissent au son de l’accordéon de Marianne, petits et grands confondus, ou à travers les chantiers participatifs, chaque famille surmonte les épreuves des premières années dans l’éco-hameau. Nous avons été enthousiasmées par ce choix de vie, impressionnées par le don de soi que chacun fait aux autres dans une générosité abondante, tout en étant conscientes des difficultés d’une telle vie, où l’équilibre entre intimité familiale et entraide collective est parfois délicat à trouver, et où les visions sur les différents projets peuvent s’entrechoquer.

 Nous ne souhaitons pas que ce séjour reste une expérience ponctuelle sans incidence sur notre vie. Grâce aux familles de la Bénisson-Dieu, nous avons saisi que l’écologie ne pouvait plus être seulement un vague centre d’intérêt mais un devoir pour tout chrétien, une urgence qui doit orienter chacun des choix importants de notre vie. Comment concilier la nécessité de l’écologie avec notre futur métier, notre potentielle future vie de famille… telles sont les questions que nous nous posons désormais. Pour l’instant, nous sommes encore dépendantes de nos parents et notre marge de manœuvre est assez limitée dans le cadre d’une vie étudiante ! Mais c’est dans certaines petites choses du quotidien que nous essayons d’agir : en en parlant autour de nous afin d’opérer une prise de conscience chez nos proches, en planifiant des vacances qui ne poussent pas à la consommation abusive -micro-aventure en France, par exemple randos et bivouacs…- et ne nécessitent pas de prendre l’avion, en se donnant des petits objectifs qui réduisent les déchets de plastique, par exemple la salle de bains zéro déchet, et en lisant Limite !

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