Nos amis du Foyer Marie Jean ont mis la conversion écologique au cœur de leur engagement. Basée en Ardèche, près de Saint-Julien-Vocance, cette petite communauté de vie consacrée réunit des frères et des sœurs qui vivent ensemble leur foi sous la conduite d’une mère spirituelle. Nous publions des extraits d’un texte partagé lors de la dernière session d’écologie intégrale du Foyer. A suivre !

Petite anecdote en guise d’introduction

Avril 2019, dans le métro, à Lyon. Un jeune père entre avec ses deux enfants. Il vient de les reprendre parce qu’ils ont jeté des papiers par terre. A la cantonade, avec un grand sourire : « C’est bien beau de vouloir sauver la planète, mais il faut commencer par savoir gérer ses déchets… »..

La discussion s’engage : « Je suis un écologiste convaincu, mais ce n’est pas simple. On voit bien ce qu’on devrait faire, mais y arriver, c’est autre chose : avec les enfants, on a d’abord diminué les emballages, en achetant des biscuits en gros ; et puis, ensuite, comme il restait quand même une boîte à jeter, on leur a proposé un goûter dont on peut manger l’emballage : un fruit avec sa peau ! Bien sûr, au départ, ils ont moins aimé que les petits gâteaux… – Ah ! Cette question de la gestion des déchets ! Les pots de yaourt, par exemple. Pour l’instant, ce n’est pas recyclé. Pourtant, j’ai entendu à la radio qu’ils essaient de mettre au point un plastique plus facilement recyclable. Bon, mais avec quelle dépense d’énergie ? Autant que pour recycler le verre ? »

Une dame qui écoute depuis un moment intervient : « Mais vous savez, en fait, on sait déjà faire des pots de yaourt avec de l’amidon de maïs biodégradable ; seulement ce n’est pas encore industrialisé. – Ah, oui on sait faire, mais le maïs faut-il vraiment en faire des pots de yaourt ? Et ce maïs sera-t-il OGM ? »

Rien n’est simple donc ! Notre jeune père de famille conclut : « On fait ce qu’on peut, en sachant que de toute façon on n’y arrivera pas. »

Cette anecdote est significative. Elle montre que tout le monde est informé du péril écologique et que beaucoup essaient de faire quelque chose. Mais la complexité de la tâche et les résistances multiples peuvent nous décourager. Commençons par un constat fortifiant.

1 – Prendre des résolutions écologiques est déjà, en soi, une pratique écologique !

L’écologie est une science qui, à l’origine, étudie les relations des êtres vivants entre eux et avec leurs milieux naturels. Une science qui aujourd’hui considère toutes les réalités dans leurs interdépendances communautaires, comme un immense organisme diversifié, un réseau fonctionnel d’interactions : la biosphère.

Cette science met en évidence non seulement la structure relationnelle de tout le créé mais aussi l’alternative unique et grave qui en découle : si ces interactions diverses et solidaires sont respectées, elles portent la vie ; si ce réseau est altéré en ses équilibres fondamentaux, destruction et mort s’en suivent. Aussi comprend-t-on que l’écologie vise à favoriser ce bien commun universel qu’est l’existence et la vie du créé et qu’elle se présente tout à la fois, comme « la sagesse de ce temps, la science, l’art, l’éthique et la spiritualité de l’universel » – nous citons ici Vert comme l’espérance, livre écrit par [Nicole Echivard, la fondatrice de la communauté].

Au passage, répondons avec elle, en chrétiens certes, à notre jeune père de famille :

« Il ne s’agit pas de « réussir » : le ciel et la Terre passeront, et nous aussi. […] Il ne nous est pas demandé de « réussir » : il nous est demandé d’aimer tout ce qui « passe ». D’aimer de charité ; une charité reconnaissante et responsable… Un enfant, on l’élève, un ami malade, on le soigne, une mère, on l’honore jusqu’au bout. Aimer jusqu’au bout : c’est « réussir ». Persévérer dans l’amour, c’est n’échouer jamais. »

2 – Caractérisons succinctement la pratique écologique

La pratique écologique veut tenir compte de la nature intime – c’est-à-dire relationnelle – de la réalité, et prend soin de respecter ses interdépendances porteuses de vie. Elle a intégré que le bien de chacun passe par celui des autres. Elle fait donc appel aux plus hautes facultés de la personne humaine : son intelligence et sa volonté.

La pratique écologique requiert en effet de développer l’intelligence – citons encore notre petit livre vert (!) (Vert comme l’espérance p. 77-78) : « l’intelligence , étymologiquement « aptitude à lire l’intime des choses » ; c’est-à-dire l’aptitude à connaître, à respecter, à gérer la nature, ses lois vitales, ses lenteurs vivifiantes, les ressources, les exigences et les rythmes de sa fécondité précieuse. […] L’homme moderne choisi la « négligence : le « refus de lire les choses ». Ce faisant, il prive sa raison (spéculative et pratique) de sa dignité : être l’accueil intelligent, « compréhensif », du réel dans sa diversité, ses interdépendances, son unité, son ordre vivant ; et quand il y a déséquilibre, disproportion, désordre, en lui-même ou autour de lui, réordonner par des décisions et des actes sages, c’est-à-dire qui tiennent compte du bien réel personnel et commun […] Ce qui certes n’est pas facile ; implique des patiences et des sacrifices. »

Eh oui, la pratique écologique demande un travail sur soi ! Le pape François dit que nous sommes devant « un défi éducatif » qui nous concerne tous, car « la conscience de la gravité de la crise culturelle et écologique doit se traduire pas de nouvelles habitudes ». (Laudato Si n°209) Or « c’est seulement en cultivant de solides vertus que le don de soi dans un engagement écologique est possible » (n°211)

Il ajoute même :« Nous devons examiner nos vies et reconnaître de quelle façon nous offensons la création de Dieu par nos actions et notre incapacité d’agir. Nous devons faire l’expérience d’une conversion, d’un changement du cœur. » (n°218)

A suivre !