Portrait d’une association de fêlés qui pensent que l’art peut transmettre une vision salutaire du monde.

A quelques pas de la porte de Versailles, au fond d’une cour où s’entassent cageots de bois, bouts de ficelle, selles de cheval et matériaux en tous genres, trône, impertinent et apostropheur, un immense point d’interrogation. La bête interpelle les curieux qui s’aventurent dans ce lieu étrange, en se demandant presque craintivement sur quoi ils vont tomber. 

Nul besoin de sonner ou de tirer la chevillette, la porte est grande ouverte. Le visiteur n’est pas au bout de ses surprises ; il découvre une véritable caverne d’Ali-Baba, dans laquelle sont empilées un nombre impressionnant de sculptures en plâtre. Certaines sont achevées, d’autres en cours de réalisation. S’y ajoutent des dessins et croquis au mur, de la peinture et des bacs à sable, mais aussi une table où de drôles de types discutent autour d’un café. Un atelier d’artistes comme les autres ? Pas vraiment. Une version artistique et actualisée de Woodstock ? Non plus. Un lieu de rencontres Emmaüs ? Toujours pas. Manuella et Philippe, son époux, éclairent notre curieux quelque peu décontenancé face à cet endroit qu’il ne parvient pas à définir. 

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La vocation première de l’art

Il y a un an, le couple a créé l’association Matreselva, qui s’est installée dans cet atelier du XVème arrondissement. Le but de l’association ? « Révéler la beauté du monde, et transmettre la joie de vivre par la créativité », explique Manuella. Rien que ça ! Matreselva porte un message positif sur l’humanité et la création, à l’heure où l’art contemporain propose essentiellement du morbide, et donne une vision erronée de la vie qui ne serait qu’un amoncellement d’horreurs. Au fond, il s’agit de retrouver la vocation première de l’art, qui consiste à donner à voir du beau et dire quelque chose de notre existence, en dépassant les mots ou en les complétant.

Matreselva œuvre pour le dévoilement de tous les talents, qu’ils soient artistiques ou non. L’association propose de nombreux ateliers visant à servir la diversité des talents. On compte, par exemple, un atelier de découverte des techniques vocalesou l’atelier « Belles d’âmes », qui révèle et donne du sens à la féminité de chacune. A cela s’ajoutent les « Ça me dit d’y aller » du samedi, qui offrent à tous la possibilité d’apprendre, en participant à la collection de sculptures de Philippe et Manuella selon l’esprit de cercle vertueux qui anime Matreselva, ou encore les soirées « d’étymologie déraisonnable » où, sans « serre-yeux », on fait de l’ « hors-raison » en jouant avec les mots afin d’en saisir l’esprit. Il s’agit moins de cours académiques que de moments de découverte et d’échange entre les participants, qu’ils soient des membres fidèles de l’association ou de simples curieux venus voir. 

L’échange au coeur de Matreselva

Car le charisme premier de Matreselva est sans doute l’accueil et l’importance accordée à l’échange. L’une des richesses de Matreselva tient à la diversité des profils qui la composent. Chacun est accueilli tel qu’il est pour prendre le temps de discuter de ce qu’il souhaite. « On peut même parler des sujets qui fâchent ! » lance malicieusement Manuella. Des rencontres improbables ont lieu, on parle librement de foi et d’espérance sans que personne ne crie atteinte à la laïcité. On prend le temps de redonner aux mots toute leur signification en écoutant attentivement les démonstrations délurées de Philippe, grand théoricien de « l’art crête-un », pour qui l’artiste doit élargir son regard vers un horizon plus étendu en montant sur la crête, et partager au monde ce qu’il a vu

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Dans nos villes gargantuesques où il est difficile de voir comment retrouver le contact face à un individualisme et à un isolement toujours plus inquiétants, l’atelier Matreselva est un lieu de joie où la viela créativité et la rencontre avec l’autre sont célébrées. C’est ce qui fait la simplicité riche et féconde de l’accueil de Manuella et Philippe, et de leurs amis. « Il y a plein d’alternatives », affiche le prochain numéro de Limite. Matreselva en est une, et pas des moindres.

Toute jeune association, Matreselva porte une multitude de projets qui ont besoin de soutien pour voir le jour. Chacun peut, s’il souhaite encourager l’action créatrice de l’association, participer à cette belle aventure. Il est important que Matreselva puisse compter de nouveaux membres pour lui donner de l’ampleur. Pour cela, il suffit d’adhérer à l’association en payant une cotisation annuelle de 30 euros. Chaque membre compte ! Matreselva est aussi à la recherche de mécènes – entreprises, fondations ou particuliers, pour l’aider à pérenniser l’aventure. Vous pouvez faire un don en vous rendant sur www.matreselva.com