Les nuages inspirent la rêverie poétique… mais quid des nuages de pollution ? Dans un très bel ouvrage, les auteurs de Man Made Clouds proposent une esthétique pertinente de la folie des pots d’échappement et des fumées d’usine.

Man made clouds est le titre d’un livre qui sortira le 21 septembre prochain aux éditions HTX. Ouvrage du collectif Hehe (créé par les  artistes Helen Evans et Heiko Hansen, vous comprenez l’astuce ?), il regroupe les contributions de six auteurs rassemblés par une thématique commune : les émissions humaines de particules. Autrement dit, la pollution. Photomontages, compositions, photographies d’installations plastiques, etc. les pages contiennent de petits trésors d’imagination et forment ensemble un véritable plaidoyer écologique.

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Si évoquer les nuages n’a rien d’étonnant de la part d’un artiste, la référence, volontairement lyrique, sert ainsi à sublimer ceux qui sont formés par l’homme. C’est d’ailleurs le sens du titre apparemment poétique du livre : Man made clouds peut se traduire à la fois par « L’homme fabriqua le nuage » et par « Les nuages faits d’hommes ».

Au départ, on pourrait donc croire à une simple démarche artistique, inscrite dans la capacité des créatifs à s’inspirer de tout. Qui n’a jamais vu dans le fin filet d’une fumée de cigarette un certain charme quand, dans la pénombre du noir, elle fait preuve de présence ? Qui n’a jamais levé les yeux, captivé par une belle lumière capturée dans une épaisse fumée d’usine ? Qui, enfin, ne s’est jamais laissé aller à rêver devant une Bentley, un Mirage ou un yacht ? Les images sont belles et la conscience limitée à ce plaisir des yeux. Mais peut-on réellement s’émerveiller de cette beauté factice (faite par l’homme) et destructrice (de son environnement) ?

Tel un portrait de Dorian Gray, ce livre cherche à percer la réalité de ce qui nous semble beau et bon. Nous sommes fascinés et mal-à-l’aise de contempler l’esthétisation de ces centrales nucléaires, de ces plateformes pétrolières, de tous ces avatars fumeux et fumant de notre société productiviste. Les artistes nous les mettent sous le nez pour mieux nous en faire sentir les odeurs. Derrière leur œuvre, le drame, ou la réalité ? En voyant ce monde industriel dans sa force excitée par les lumières, à travers les prises de vue réalisées, l’on saisit immédiatemment l’omniprésence des risques de catastrophe écologique.

Le collectif Hehe n’en est pas à sa première œuvre sur cette thématique. Nuage Vert, projet ambitieux du groupe réalisé en 2008 à Helsinki, avait d’ailleurs reçu de nombreuses récompenses : « Environmental Art Fund » en Finlande et  « Golden Nica » du festival Ars Electronica notamment. L’objet des louanges ? Un rayon laser entourait le nuage de fumée émis par une centrale nucléaire. Le cercle lumineux ainsi créé changeait de taille en fonction de la consommation des habitants.

A noter dans vos agendas : le projet COAL (Coalition pour l’art et le développement durable) organisera une séance de signature pour la sortie de Man Made Clouds en présence des artistes. Rendez-vous le 21 septembre à 19h à la Recyclerie (83 boulevard Ornano dans le 18e parisien).

Man Made Clouds : Edition HTX,  Collection O(x) ; Auteurs : Jens Hauser, HeHe, Noortje Marres, Gunnar Schmidt, Malcom Miles et Jean-Marc Chomaz ; 496 p. ; 30€ ; papier confectionné à partir de tabac bio

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