Le modèle économique actuel est linéaire : Prendre-Consommer-Jeter. Renversons la perspective et rêvons d’un modèle circulaire, non polluant. En plus d’être produit de façon renouvelable, le bien ne serait pas jeté. Chaque composant serait réutilisé sans fin. Seulement, qui dit changement de système dit en fait changement de travail. Voici un repérage pour Limite de quelques pistes.

 

Certains économistes, comme le Club de Rome dans « The Limits to Growth » ont souligné combien le modèle linéaire est inefficace et insoutenable sur le long terme. En épuisant les ressources et, au bout de la chaîne, en polluant ces mêmes ressources, l’économie linéaire génère un gâchis important. Par exemple, le rapport « Growth within », de la fondation Ellen McArthur estime à 30% la proportion de nourriture non consommée et jetée. C’est la fuite en avant consumériste. À l’inverse, que proposer ? Ici intervient l’idée d’économie circulaire.

 

Cinq modèles d’activités

Pour vivre de son travail, il faut s’employer selon un modèle d’activité. Comme le modèle de la douane aux ponts a employé les villes fluviales, comme le modèle du lieu social a employé les tavernes, comme le modèle de cultivation au surplus a employé les paysans, l’économie circulaire doit pouvoir offrir des modèles porteurs. Le cabinet Accenture en a trouvé 5 (Circular Advantage, 2014) :

La production régénérative. Au début de la chaîne, l’idée est de forger des produits à partir de matériaux régénératifs (qui peuvent être reconstitués sans épuisement de ressources), au minimum biodégradable et idéalement à l’aide d’énergies renouvelables. La production de sacs de courses – non plastiques donc sans pétrole – est un premier pas vers ce modèle d’activité.

Le recyclage et la récupération de ressources. En bout de chaîne, l’idée est de réutiliser les ressources contenues dans le produit. C’est le cas par exemple d’Eco-Emballages, plateforme française de reprise des matériaux.

L’extension de la vie du produit. Au cœur de la chaîne du produit, l’idée est de proposer des services de réparation, revente, réutilisation, contre l’obsolescence programmée. C’est le cas par exemple de notre artisan du coin, réparateur ou à plus grande échelle des entreprises de remanufacturation (Caterpillar remettant à neuf les machines) ou de la tentative de Fairphones.

La plateforme de partage. Au cours de l’usage d’un produit, l’idée est de ne pas le laisser pourrir au placard pour le cas où mais d’en employer sa disponibilité. Le succès de BlaBlaCar, des réseaux d’entraides et de mise en commun, ouvre des pistes d’activités.

Le produit comme un service. Pour une entreprise, un vrai modèle circulaire serait de maîtriser toute la vie du produit : vendre le service lié à l’usage tout en en gardant la propriété. Par exemple, le modèle des flottes de vélos comme le Vélib’ ou de voitures comme Car2Go est un modèle maintenant porteur.

 

Qu’en retenir ?

Bien entendu, ces modèles d’activités sont marginaux actuellement. Tout le monde ne peut encore vivre d’emplois selon cette logique circulaire. En clair, nous ne sommes personnellement pas prêts à renoncer à la simplicité de jeter au moindre défaut du produit. Et à plus grande échelle, on peut douter des effets d’annonces de la part des grands groupes multinationaux dont le cœur de métier reste linéaire : Prendre-User-Jeter. On citerait ainsi l’exemple du label « Circular Economy Multinational » décerné au Forum de Davos.

Cependant, il est nécessaire de repérer les initiatives proposant des nouveaux modes de travail et les intégrer, en théorie, dans les choix d’investissements. Par exemple, l’indice de circularité développé par Enel est une manière de faire attention à toutes les étapes de la vie d’un produit. Comment a été produit ce bien, comment est-il utilisé, comment sera-t-il traité en fin de vie ? Cherchons un nouveau modèle économique.

Le cycle du produit et les modèles d’activité © Accenture 2014

 

CirculAbility model © Enel 2018

Jean-Baptiste Caridroit