Découvrez l’édito du quatrième numéro papier de la revue Limite. La revue est en vente en ligne ou chez votre libraire (plus de 250 points de vente). Vous avez également la possibilité  de vous abonner pour recevoir les  numéros suivants.

Étendre les limites de l’empire des hommes sur la nature entière pour exécuter tout ce qui est possible » : tel est le but avoué de l’humanité dans La Nouvelle Atlantide, utopie imaginée par Francis Bacon en 1624. Quatre cents ans plus tard, on en est toujours là : des OGM aux PMA, du cyborg au nucléaire, nous n’avons de cesse de soumettre la nature à nos fantasmes, quelles qu’en soient les conséquences sociales ou environnementales. Notre idée du progrès n’est qu’affaire de puissance, et de puissance technique, indéfiniment accrue. Comme si le monde n’était qu’une masse informe à exploiter. Comme si, au fond, le bonheur n’était pas là, à portée de main, mais ailleurs – toujours plus loin – accessible à ceux seuls qui s’adaptent et se battent. Aux winners, flexibles, malléables, compétitifs. Malheur aux lents, mort aux retardataires ! Honte aux demeurés qui préfèrent leur enclos à l’univers, les repères du familier aux vertiges de l’inconnu ! – Le changement est à ce prix.

« Enrichissez-vous par le travail et par l’épargne », entendait-on en 1830. « Adaptez-vous aux évolutions du marché globalisé », nous répète-t-on depuis. Que voulez-vous, rien n’est gratuit : il faut bien rentabiliser la production pour récompenser les actionnaires, quitte à ruiner les concurrents. Car aux jeux olympiques du PIB, il ne suffit pas de participer. Tous les coups sont permis : il faut vaincre pour vivre – et vivre pour vaincre. Le spectateur, quant à lui, a le choix : payer ou disparaître, consommer ou crever.

La GPA ne sera jamais éthique, le capitalisme durable ou la réalité virtuelle.

Depuis maintenant plus d’un an, Limite combat pied à pied cette frénésie destructrice. Non par amour du passé, ni par peur de l’avenir, mais parce que cette fuite en avant n’est qu’une course au néant. Car en exaltant la toute-puissance technologique, ce sont nos propres conditions d’existence que nous menaçons. On peut faire taire les réfractaires, culpabiliser les peuples de vivre à leur façon, on se heurtera toujours au mur des faits : tout ce qui est imaginable n’est pas possible et tout ce qui est possible n’est pas souhaitable. La GPA ne sera jamais éthique, le capitalisme durable ou la réalité virtuelle. Répandre ces fables, c’est contribuer à transformer l’incroyable créativité humaine en grossière machine à fric. Comment s’étonner dès lors que le travail perde du sens, individuellement et collectivement ? Et qu’à la fierté de l’œuvre accomplie se substitue si souvent l’absurdité d’emplois pour ainsi dire fictifs ? Métro, boulot, conso : jusqu’ici tout va bien – combien de temps encore ? Car ce ne sont plus seulement les travailleurs qui risquent le burn out, mais nos sociétés, et la planète elle-même.

Face à ces défis, Limite engage toute sa jeunesse. Votre revue s’étoffe pour mieux faire entendre la voix de l’écologie intégrale dans le débat public. Avec des recrues de choix, une maquette remaniée et des pages en plus, nous continuerons à tracer la piste d’une décroissance active et conviviale dans la jungle médiatique. Mais pour que notre travail puisse porter du fruit, nous avons besoin de votre soutien. Abonnez-vous et relayez-nous ! Vous êtes nos seuls investisseurs ! Dieu vous le rendra. La nature aussi !