Dans un article qui inaugure le partenariat entre le quotidien La Croix et la revue Limite, Gauthier Vaillant pousse un cri revigorant contre l’émoustillante révolution sexuelle et ses dérives pornographiques. Il appelle à replacer l’amour dans une perspective chrétienne.

D’aucuns jugeront sans doute à la limite du cliché que La Croix consacre au Bon Dieu sa première apparition dans Limite. Que voulez-vous, on ne se refait pas. Et après tout, être là où on vous attend, c’est parfois un gage de fiabilité et même, de fidélité. Et ça, c’est beau comme un couple de petits vieux qui s’aiment encore.

« Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu », nous demande le Christ à propos de l’impôt – et en fait, de l’argent. En matière d’amour c’est pareil. On n’aura pas trop de mal, d’ailleurs, à rendre à César, et même à lui laisser, le fric généré par l’industrie pornographique et les recettes publicitaires de Tinder. Mais alors, il ne faudrait pas oublier non plus de rendre à Dieu ce qui est à lui : l’amour, le vrai. Pas celui qu’on fait avec une conquête d’un soir, ni les mièvreries aseptisées d’Hollywood, qui se terminent généralement au moment du premier baiser ou du mariage, c’est-à-dire là où tout commence !

« Dieu est amour », professe le christianisme, sous la plume de Benoît XVI ou dans les chants de Taizé. Ce n’est pas qu’une formule. La Création n’est rien d’autre que l’acte d’un Dieu désirant avoir des créatures à aimer. La venue de Jésus, quelques milliards d’années plus tard, et sa mort sur la croix pour racheter la faute des ingrats que nous sommes, ce n’est que de l’amour. « Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés », ce n’est pas un résumé : c’est tout ce qu’il y a à faire.

Voilà qui n’est pas sans conséquences sur nos histoires de cœur. Car l’amour humain, sous toutes ses formes, vient de Dieu. Celui du conjoint, celui de l’ami, celui du frère ou de la sœur. Celui qu’on reçoit et celui qu’on donne. Ce n’est rien d’autre que sa capacité à aimer qui fait de l’homme une créature « à l’image et à la ressemblance de Dieu ». Même si c’est beau comme tout, dire cela ne doit pas servir qu’à se faire du bien. L’amour auquel le Christ nous appelle est un idéal exigeant. Et critiquer l’actuel triomphe du porno et la sexualité par écrans interposés ne doit pas mener à considérer que tout compte fait, une sexualité débridée mais bien réelle n’est pas si condamnable. Les promesses émoustillantes de la libération sexuelle ne portaient- elles pas en germe l’actuel triomphe du porno et d’une sexualité autocentrée ?

Pour dépasser cette triste alternative, osons replacer nos amours dans une « perspective chrétienne », comme le dit une prudente expression à la mode chez les cathos. On ne parle pas ici de se marier à 18ans et de faire douze gosses (mais c’est votre droit le plus strict). Mais de se rappeler que c’est Dieu qui nous donne un autre à aimer, en même temps que c’est lui qui nous donne la capacité de l’aimer. Jésus nous invite à un amour qui ne cherche pas son propre plaisir, mais d’abord le don de soi à l’autre. C’est cette perspective chrétienne qui fait écrire au philosophe Martin steffens ce bel éloge de la fidélité, dans son essai L’Amour vrai : « Une vie ne suffirait pas pour accueillir le mystère d’un seul être. » Aimons-nous, vite !

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